Un timing parfait
« Certains n’ont pas hésité à accuser la Fed de retarder une baisse des taux d’intérêt qui aurait dû intervenir plus tôt, plaidant pour une réduction de 50 points de base lors de la réunion des 17 et 18 septembre, au lieu de la réduction de 25 points de base prévue par le consensus Bloomberg. Nous pensons toutefois que cette interprétation est incorrecte », souligne Michele Sansone, directeur national de Tradeo. Selon les dernières données du Bureau américain des statistiques du travail, 818 000 emplois de moins que prévu ont été créés aux États-Unis entre avril 2023 et mars 2024.
« Les données sur l’emploi aux États-Unis font souvent l’objet de révisions importantes. Une baisse de 800 000 emplois par rapport à l’estimation initiale peut sembler importante, mais elle ne l’est pas tant que cela si on la compare aux années précédentes. De plus, il faut éviter de surinterpréter ce chiffre car l’estimation finale, qui peut différer de celle publiée récemment, ne sera pas publiée avant février 2025. »
Si l’on considère ces données dans une perspective plus large, avec d’autres indicateurs tels que les réservations d’hôtels ou de spectacles, il est clair que l’économie reste forte. Elle ralentit peut-être, mais les consommateurs américains continuent de dépenser à un rythme soutenu. « Les plans de la Fed sont donc parfaitement en ligne : ni trop tôt, ni trop tard. Il n’y a pas lieu de se précipiter : nous pensons qu’une réduction de 25 points de base en septembre est parfaite », estime M. Samson.
BCE : trop peu, trop tard ?
Dans la zone euro, cependant, la croissance ne parvient toujours pas à dépasser 1 %. Pourquoi ? La politique monétaire n’est pas assez conciliante, selon M. Samson. « Si l’on considère la situation économique européenne, nous pensons qu’une baisse de taux de 50 points de base en septembre serait préférable à la baisse de 25 points de base initialement prévue », souligne l’expert. Comment expliquer alors la récente appréciation de l’euro ?
On en a beaucoup parlé ces dernières semaines : regain d’optimisme des investisseurs sur la croissance de la zone euro, anticipation d’une baisse des taux de la Fed. En réalité, « la baisse des rendements obligataires américains est le principal moteur de l’appréciation de la paire euro/dollar. Cela incite les investisseurs à délaisser le dollar au profit d’autres devises, comme l’euro. Toutefois, il n’est pas certain que ce phénomène perdure. L’écart économique structurel entre la zone euro et les États-Unis est un facteur à long terme qui pourrait peser sur la monnaie européenne », indique M. Sansone.
La Banque du Japon enfin parmi les plus performantes
Quant au Japon, il est en train de redevenir une économie saine. L’inflation est revenue depuis 2022, les salaires ont fortement augmenté – avec une hausse négociée de 5,3 % au printemps 2024 – et le marché boursier s’est redressé. C’est enfin la fin de la déflation. « Bien que le vieillissement de la population et la dette astronomique du Japon restent des problèmes structurels, l’économie semble de nouveau sur les rails.
Les augmentations de salaires ont stimulé la consommation, réduit l’attitude d’épargne et les investissements des entreprises ont augmenté de manière significative. Un cycle vertueux est en train de se mettre en place », poursuit M. Sansone.
« Le rôle de la Banque du Japon est maintenant de consolider la trajectoire économique du pays. Une nouvelle hausse des taux est certainement nécessaire », prédit l’expert. Elle ne se produira probablement pas ce mois-ci, mais plutôt au quatrième trimestre, avec une augmentation de 10 points de base. Ce mouvement est soutenu par l’ensemble de la classe politique, y compris Shinjiro Koizumi, qui pourrait devenir le prochain premier ministre du Japon à l’issue des élections internes du Parti libéral-démocrate prévues le 27 septembre.