Le député européen Stefan Berger vient de présenter une proposition sur la naissance de l’euro numérique qui devra être approuvée en commission (probablement en mars) puis en session plénière du Parlement (peut-être en avril). Le projet, cependant, prendra du temps. M. Cipollone a déclaré hier qu’au niveau technique, après la phase de préparation actuelle, qui a commencé en novembre et se terminera fin 2025, cela pourrait prendre encore “quelques années”.
Ce temps sera nécessaire pour mettre en œuvre l’un des projets les plus complexes de l’Union monétaire, mais aussi l’un des plus importants au vu de l’évolution technologique des paiements. L’objectif de la BCE est d’assurer une monnaie numérique publique à côté de l’argent liquide, qui restera central pour l’Eurosystème mais qui est de moins en moins utilisé dans les transactions.
Les espèces sont utilisées dans 59 % des transactions, en forte baisse par rapport aux 72 % de 2019, une tendance qui devrait se poursuivre dans les années à venir. L’argent liquide en circulation a commencé à diminuer. Dans le même temps, les frais des circuits de cartes internationaux dans l’UE ont presque doublé entre 2016 et 2021, passant de 0,08 % à 0,15 % par transaction.
Renforcement de la protection de la vie privée
L’une des craintes les plus répandues parmi les citoyens concerne la confidentialité de l’euro numérique. “Nous sommes déterminés non seulement à protéger mais aussi à renforcer la confidentialité des paiements”, a déclaré M. Cipollone. À cet égard, le membre de la BCE a rappelé que l’euro numérique serait également utilisable hors ligne, d’une manière qui nécessiterait une proximité physique et garantirait un niveau de confidentialité similaire à celui de l’argent liquide. Les informations personnelles sur les transactions ne seraient connues que du donneur d’ordre et du bénéficiaire.
En outre, l’euro numérique permettrait aux citoyens d’effectuer des paiements en ligne avec “des normes de confidentialité très élevées, en fait plus élevées que celles offertes par les solutions commerciales actuelles”, a souligné M. Cipollone. L’Eurosystème ne serait pas en mesure de retrouver l’identité d’un utilisateur. Les citoyens pourraient, comme aujourd’hui, contrôler l’utilisation des données par les banques et les prestataires de services de paiement, qui devraient s’occuper de la lutte contre le blanchiment d’argent et le terrorisme.
La BCE a également suggéré d’offrir une plus grande confidentialité pour les paiements numériques en ligne en euros de faible risque et de faible montant. On peut toutefois se demander ce qui se passerait si les paiements étaient gérés par des entreprises de haute technologie qui exploitent les données à des fins commerciales.
Garanties pour le système financier
M. Cipollone a indiqué qu’il y aurait des garde-fous pour éviter les effets négatifs sur le secteur financier. Comme pour les billets de banque, les avoirs en euros numériques ne seront pas rémunérés et n’entreront donc pas en concurrence avec les dépôts bancaires. En outre, il y aurait des limites à la possession et il serait possible d’effectuer des paiements en ligne en euros numériques sans avoir à approvisionner au préalable des comptes.
La monnaie numérique est conçue comme un moyen de paiement et non comme une forme d’investissement. Au cours des deux prochaines années, la BCE définira les règles qui régiront l’euro numérique : ce sera comme “un réseau ferroviaire européen commun qui peut être utilisé par les trains de différentes compagnies”, a déclaré M. Cipollone. En outre, Francfort définira des accords-cadres avec d’éventuels fournisseurs européens auxquels elle ne sera liée en aucune manière.