Les économistes des banques d’investissement prévoient la prochaine baisse des taux en décembre, notamment parce que peu de données économiques seront publiées avant la réunion d’octobre. Les marchés monétaires, quant à eux, escomptent une réduction de 50 % dès la prochaine réunion du Conseil. Les experts soulignent toutefois le risque que la BCE sous-estime les signaux négatifs de croissance dans les mois à venir. Hier, Francfort a réduit ses estimations de croissance du PIB de 0,1 % pour 2024 (+0,8 % est désormais attendu) et pour les deux prochaines années.
Le point de vue des économistes
« S’il y a une préoccupation, elle semble être le ralentissement de la demande », a déclaré Frederik Ducrozet, responsable de la recherche macroéconomique chez Pictet WM. « Le risque est donc que les baisses de taux soient plus importantes et plus rapides. Une éventuelle accélération des réductions de la Fed pourrait également peser sur ce point ». Pour Citi, la BCE est « relativement insensible aux données de croissance décevantes et encline à un resserrement excessif ». Une accélération des réductions cette année reste improbable, tandis que les réductions sont plus susceptibles d’être plus rapides et/ou plus importantes l’année prochaine.
Chute de l’inflation
La réduction a été justifiée par Lagarde par les bons signaux sur l’inflation à moyen terme : les nouvelles projections, inchangées par rapport à celles de juin, montrent pour la cinquième fois consécutive que le coût de la vie reviendra durablement à 2 % à partir de la seconde moitié de 2025.
Les prévisions auraient probablement été inférieures si les prix de l’énergie avaient été actualisés aux valeurs de ces derniers jours. Le président de la BCE a déclaré qu’il pourrait y avoir un faible taux d’inflation en septembre, mais il a également précisé que la banque centrale « ne regarde pas les données individuelles ». Le coût de la vie pourrait alors augmenter à nouveau à la fin de l’année en raison d’effets de base.
La principale incertitude concerne l’inflation dans les services, dont la tendance a été qualifiée d’« insatisfaisante » par Mme Lagarde. Les faucons du Conseil des gouverneurs ont mis l’accent sur les craintes dans ce domaine ces derniers jours. Les estimations de l’inflation de base, hors énergie et alimentation, ont été relevées de 0,1 %.
Toutefois, même dans les services, une baisse est attendue l’année prochaine, selon le président de la BCE. À cet égard, Mme Lagarde a souligné que les salaires par employé ralentissent, que la productivité s’améliore et que les entreprises absorbent l’impact final de la hausse des salaires sur les prix.
Risques sur la croissance
À ce stade, les risques sur la croissance, « orientés à la baisse » selon la formule également utilisée par la BCE hier, sont plus importants que ceux sur l’inflation. Mme Lagarde a fait remarquer qu’au sein du Conseil des gouverneurs, « certains sont plus optimistes, d’autres plus pessimistes ». Le président de la BCE a noté qu’une augmentation de la consommation liée à une hausse des salaires des travailleurs et à un moindre resserrement monétaire devrait donner un coup de fouet au PIB.
Cependant, la reprise de la consommation tant espérée ne s’est pas encore concrétisée : au contraire, la confiance des entreprises et des citoyens ne cesse de diminuer selon les indices d’anticipation. L’emploi, qui s’est maintenu jusqu’à présent, pourrait s’inverser. L’inflation globale pourrait se retrouver en dessous de l’objectif de 2 %, une hypothèse qui n’est pas exclue même par Lagarde.
Comme prévu, le taux principal de refinancement a été abaissé de 60 points de base (à 3,65 %), réduisant ainsi l’écart avec le taux de dépôt à 15 points de base. Cette nouvelle n’a pas d’impact sur la politique monétaire pour le moment.