« Les autorités chargées de l’enquête, souligne le ministère, ont établi qu’il y a eu dumping, que l’industrie nationale du brandy a été menacée et qu’il existe un lien de causalité entre le dumping et la menace d’un préjudice important. »
La décision de Pékin
La décision de ne pas imposer de droits de douane sur le brandy pourrait être une manœuvre stratégique de Pékin qui, entre-temps, fait pression sur les 27 États membres de l’UE pour qu’ils rejettent la proposition de la Commission européenne d’adopter des droits de douane supplémentaires allant jusqu’à 36,3 % sur les véhicules électriques produits en Chine, une décision qui sera soumise au vote au mois d’octobre.
Cette démarche a donc tout l’air d’un geste diplomatique de bonne volonté envers l’Occident, d’autant plus que les alcools, comme les produits laitiers, font partie des principales importations que la Chine peut utiliser comme levier contre les droits de douane imposés aux véhicules électriques. « Il semblerait qu’il s’agisse d’une tactique de négociation de la part de la Chine », a noté Laurence Whyatt, analyste chez Barclays, cité par Reuters.
« Sera-t-elle en mesure de convaincre l’UE de revenir sur certaines des mesures imposées ? Cela reste à voir ». Il n’est cependant pas certain que la Chine ne décide pas de prendre des mesures à l’avenir, étant donné que le ministère, dans le même communiqué, a tenu à rappeler que la pratique du dumping existait et que notamment les deux maisons de brandy françaises vendaient leurs produits avec une marge comprise entre 30,6 % et 39 %.
Les actions des producteurs français de spiritueux Remy Cointreau et Pernod Ricard ont bondi d’environ 8 % immédiatement après l’annonce, puis ont réduit leurs gains à +2 % et 1,98 %. Campari a également augmenté de 1,7 % hier. Toutefois, Pernod Ricard s’est montré prudent à l’égard de la Chine, malgré la décision du pays de ne pas imposer de droits de douane.
Le même jour, le géant français des vins et spiritueux a annoncé une forte baisse de 35% de son bénéfice net annuel à 1,48 milliard d’euros, attribuée à la « normalisation du marché » après la reprise post-Covid et à un environnement économique « incertain ». Le groupe français, numéro deux occidental de la production de spiritueux, et ses rivaux ont souffert après que le boom des ventes de spiritueux post-Covid se soit inversé en raison des taux d’intérêt élevés, de l’inflation et aussi des défis économiques en Chine, le marché numéro un pour les spiritueux.
L’exposition des géants de l’alcool à la Chine
Campari, qui a racheté le cognac Courvoisier, est exposé à la Chine à hauteur de 4 %. Moins que lui : 5 % pour Diageo, 12 % pour Pernord Ricard et 30 % pour Remy Cointreau. En janvier, lorsque la Chine a ouvert son enquête antidumping, les analystes d’AlphaValue avaient calculé l’impact que pourrait avoir une réduction de 30 % des ventes de ces marques à Pékin. Le rapport a montré que les bénéfices par action d’entreprises telles que Diageo pourraient ralentir de 0,6 à 0,7 % entre 2024 et 2025. Pour des sociétés comme Campari, l’impact était estimé entre 2,2 % et 5 %, pour Pernod Ricard à plus de 10 %, et dans le cas du géant du cognac Rémy Cointreau à plus de 20 % pour les deux années.