Les tensions internationales ont fait de l’approvisionnement en matières premières et de la disponibilité d’une énergie abordable des défis pour la compétitivité de l’Europe. Dans le classement mondial Imd, la position de l’Europe est restée inchangée ces dernières années, mais avec de fortes différences internes : l’Allemagne et la France ont vu leur compétitivité se dégrader en raison de la faible efficacité de leur gouvernement, de la faiblesse de leur politique fiscale, de la faible résilience de leurs entreprises et de l’insuffisance de leurs infrastructures énergétiques.
Le Danemark, l’Irlande et les Pays-Bas ont amélioré leur position en raison de ces mêmes facteurs.
Les deux grandes transitions de l’Europe
Les éléments suivants sont essentiels à la compétitivité internationale de l’économie européenne : la productivité du travail, qui s’est ralentie à l’échelle mondiale et la transition verte, pour laquelle la Commission européenne a lancé le “Green Deal” (Pacte Vert). Depuis les années 1990, la France a perdu une partie importante de sa capacité à exporter de la valeur ajoutée et subit la pression de concurrents tels que la Slovénie et la Slovaquie.
Grâce à la double transition numérique et verte, l’UE deviendrait le premier continent climatiquement neutre d’ici à 2050. Le Green Deal européen a défini des objectifs et des délais stricts. La politique énergétique est aujourd’hui au cœur d’une mutation inévitable, générale et profonde. La solution est offerte par le modèle basé sur les sources d’énergie renouvelables et l’efficacité énergétique.
Le European Net-Zero Industry Act (mars 2023) établit un cadre pour la fabrication de produits technologiques adaptés à des émissions nettes nulles ou à un déploiement d’au moins 40 % d’ici à 2030, à une multiplication par près de 4 du déploiement des énergies renouvelables et à une multiplication par 15 de la production mondiale de véhicules électriques d’ici à 2050.
Entre réglementation, investissement et concurrence
Cette évolution favorise le développement technologique qui peut améliorer la performance des entreprises, mais si elle n’est pas correctement régulée, elle réduit leur compétitivité-prix et accentue la délocalisation des processus de production vers les pays émergents. Pour contrer cette tendance, le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), une sorte de droit environnemental, a été mis en place pour préserver l’industrie des invasions extracommunautaires qui ne vont pas dans le sens de la décarbonisation.
En outre, cette transition verte dépend de matériaux essentiels. La Chine possède 37 % des réserves mondiales de terres rares, a les coûts d’extraction les plus bas et a acquis de nouveaux droits d’extraction en Afrique. Cela signifie que pour que le Green Deal porte ses fruits, il faut trouver des ressources nationales adéquates. L’investissement nécessaire pour produire les 20 % de terres rares nécessaires à la stratégie européenne 2050 a été estimé à 1,7 milliard d’euros.
D’autres estimations évaluent à 2,5 billions d’euros l’investissement nécessaire pour atteindre les objectifs du Green Deal à l’horizon 2030. Pour atteindre ces objectifs, l’UE s’est engagée à réaliser des investissements annuels supplémentaires de plus de 620 milliards d’euros.
Le rôle de la Commission
En ce qui concerne les énergies propres, depuis 2017, les investissements dans l’UE se sont élevés à 1 200 milliards de dollars, contre les 4 000 milliards prévus. Ceux dans les combustibles fossiles se sont élevés à 800 milliards, soit plus que le maximum tolérable pour des émissions nulles d’ici 2050. La décarbonisation nécessiterait la suppression progressive des subventions néfastes, qui sont deux fois plus importantes que ce que la transition énergétique exigerait.
La nouvelle Commission devra : garantir des investissements suffisants dans les énergies propres en réduisant les investissements dans les combustibles fossiles ; promouvoir une production à plus forte valeur ajoutée et des politiques commerciales cohérentes avec la transition verte et ne pénalisant pas les chaînes d’approvisionnement régionales ; développer des projets alternatifs de production de terres rares ; et amener les États à se conformer au processus de décarbonisation prévu par la législation.