La décision de la Commission européenne d’imposer des droits de douane de 36,3 % sur les voitures électriques chinoises, tout en réduisant les droits de douane sur les véhicules Tesla fabriqués en Chine, a soulevé un débat animé sur les conséquences économiques et géopolitiques de cette mesure.

L’industrie automobile européenne est au cœur d’un déséquilibre commercial croissant avec la Chine, qui risque de compromettre la sécurité et l’autonomie industrielles du continent. La récente enquête de la Commission européenne sur les véhicules électriques chinois met en lumière un problème plus large : la dépendance croissante de l’Europe vis-à-vis de Pékin dans des secteurs cruciaux pour la transition écologique.

Les nouveaux droits de douane soulèvent un certain nombre de questions sur les conséquences possibles pour le marché automobile européen, ainsi que sur les effets à long terme pour les constructeurs chinois et les consommateurs européens.

Droits de douane européens de 36,3 % : protectionnisme ou nécessité ?

L‘imposition de droits de douane de 36,3 % sur les voitures électriques chinoises représente une barrière commerciale importante pour les constructeurs du géant asiatique, qui réduira considérablement la compétitivité de leurs véhicules sur le marché européen. Cette mesure s’accompagne toutefois d’une réduction des droits de douane imposés à Tesla sur les véhicules fabriqués en Chine, qui passent de 20,8 % à 9 %.

Le cas des véhicules électriques n’est que la partie émergée de l’iceberg. Depuis 2020, les importations européennes en provenance de Chine ont augmenté de manière exponentielle, initialement pour répondre à la demande d’équipements de protection individuelle pendant la pandémie, mais elles couvrent désormais un large éventail de technologies vertes. Les panneaux solaires, les batteries, les éoliennes, des secteurs autrefois dominés par les entreprises européennes, sont aujourd’hui de plus en plus sous le contrôle des entreprises chinoises.

La production industrielle chinoise a connu une croissance vertigineuse, dépassant largement la consommation intérieure et entraînant une augmentation massive des exportations.

En conséquence, l’Union européenne accuse un énorme déficit commercial bilatéral avec Pékin. Depuis 2017, alors que la Chine a connu une croissance de 40 %, les importations chinoises en provenance d’Europe ont diminué de 30 %, en raison de la décision de Pékin de soutenir massivement son secteur industriel par le biais de subventions, réduisant ainsi la dépendance aux chaînes de valeur européennes.

Conséquences pour le marché de l’UE

Le ministère chinois du commerce a déclaré que la décision de l’UE était fondée sur des faits déterminés unilatéralement, sans consultation appropriée avec Pékin. La tension entre les deux puissances économiques risque de s’intensifier, ce qui pourrait avoir des conséquences néfastes sur les relations commerciales mondiales.

La réaction des États membres de l’UE à la décision de la Commission européenne d’enquêter sur les subventions chinoises accordées aux véhicules électriques est loin d’être unanime. Des pays comme l’Allemagne et la Suède, où l’industrie automobile a un poids considérable, ont exprimé leur inquiétude quant à la possibilité de représailles de la part de la Chine, une crainte qui pourrait également influencer la position d’autres États membres.

L’UE a déjà adopté plusieurs instruments de défense contre les importations chinoises, tels que des mesures anti-subventions, des règlements sur les marchés publics internationaux et d’autres législations sur des produits tels que les panneaux solaires, les éoliennes et les puces héritées.

Toutefois, le cas des véhicules électriques est particulièrement important : environ 15 millions d’emplois en Europe sont liés à ce secteur. Bien que les importations de voitures électriques chinoises en Europe soient actuellement dominées par des marques telles que Tesla, Dacia et BMW, les fabricants chinois devraient conquérir jusqu’à 11 % du marché européen en 2024 et 20 % en 2027.

L’Europe est appelée à revoir sa stratégie commerciale et industrielle vis-à-vis de la Chine afin de protéger son économie et de garantir un avenir industriel durable et sûr.

Tesla favorisé

Tesla, en revanche, est favorisé par la réduction des droits de douane et pourrait renforcer sa présence en Europe. L’entreprise, déjà leader dans le secteur des véhicules électriques, pourrait profiter de l’occasion pour augmenter ses ventes, en tirant parti de son avantage concurrentiel par rapport aux constructeurs chinois. La mesure pourrait également permettre à Tesla de consolider sa position non seulement en tant que marque dominante dans le segment des voitures électriques, mais aussi en tant qu’exemple d’un fabricant qui opère de manière plus transparente que les subventions de l’État.

Toutefois, la réduction des droits de douane pour Tesla n’est pas sans risque. La décision de l’UE de réduire les droits de douane uniquement pour l’entreprise américaine pourrait être perçue comme une forme de favoritisme, exposant l’UE à des critiques sur l’incohérence de sa politique commerciale. En outre, la dépendance de Tesla à l’égard des composants et des batteries chinoises à des prix compétitifs soulève des questions quant à la viabilité à long terme de cette stratégie, en particulier dans un contexte de protectionnisme croissant et de représailles potentielles de la part de Pékin.