Pour bien comprendre ce qu’est exactement le MES et comment il fonctionne, il est nécessaire de partir de ses origines et de se plonger dans les réformes successives approuvées par l’Eurogroupe. Dans cet article, nous verrons ce qu’est le MES, comment il fonctionne et pourquoi sa réforme est toujours en discussion dans certains pays.

Comprendre ce qu’est le MES

Le Mécanisme Européen de Stabilité (MES) a été créé par les amendements au traité de Lisbonne, ratifiés par le Conseil de l’UE en mars 2011. L’entrée en vigueur du MES, initialement prévue pour 2013, a été avancée à juillet 2012 en raison d’une crise de la dette de plus en plus pressante.

À ceux qui se demandent ce qu’est le MES, nous pourrions donc répondre en le définissant comme un mécanisme de maintien de la stabilité financière de la zone euro. Il est régi par le droit international et, en tant qu’organisation, a son siège au Luxembourg.

Le MES est un fonds d’assistance financière qui vise à aider les États membres de l’UE qui connaissent des difficultés financières et ne sont pas en mesure de se financer par le placement normal d’obligations d’État. En échange du prêt, le pays bénéficiaire doit accepter une série de conditions, notamment un programme de remboursement et de contrôle de la dette assorti de plans d’ajustement macroéconomique, y compris des réformes draconiennes allant des pensions aux dépenses publiques.

Jusqu’à présent, le MES est intervenu pour aider des pays comme l’Irlande, le Portugal, Chypre, l’Espagne et la Grèce, pour un montant total de 295 milliards d’euros, y compris les interventions garanties par l’UE depuis 2010. Pour les lignes de crédit de précaution, en revanche, des critères moins stricts sont exigés et elles sont destinées aux États frappés par des chocs défavorables mais dont les fondamentaux financiers sont sains.

Comment fonctionne le Mécanisme Européen de Stabilité ?

Une fois que nous avons compris, du moins en principe, ce qu’est le MES, nous devons mieux comprendre comment il fonctionne et comment il préserve la santé financière de la zone euro. Le fonctionnement du fonds est défini à l’article 3 de son traité fondateur. Le MES lève des fonds pour soutenir les États membres de la zone euro en difficulté financière. On peut diviser son action en trois phases distinctes :

  1. L’État en difficulté adresse une demande d’assistance au président du Conseil des gouverneurs du MES.
  2. Le MES demande à la Commission européenne d’évaluer l’état de santé du pays en question et de définir ses besoins financiers. À ce stade, l’exécutif européen et la BCE (et si nécessaire le FMI) analysent si la crise de cet État peut s’étendre au reste de la zone euro.
  3. Après cette évaluation, l’organe plénier du MES décide d’agir et d’aider le pays en difficulté (le tout plus ou moins dans les 7 jours suivant la date de soumission de la demande formelle d’assistance). Comment l’aide est-elle apportée ? Par des prêts.

Les décisions du Conseil sont prises à la majorité simple ou qualifiée et bénéficient de l’immunité judiciaire. Les droits de vote sont proportionnels à la part payée par chaque État. Le Mécanisme européen de stabilité est géré par un Conseil des gouverneurs composé des ministres des finances de la zone euro ainsi que par un Conseil d’administration (nommé par les gouverneurs eux-mêmes).

Le MES comprend également un directeur général (qui a le droit de vote), le commissaire européen aux affaires économiques et monétaires et le président de la BCE, ces deux derniers en tant qu’observateurs.

Que prévoit la réforme du MES ?

En 2017, l’Europe s’est ouverte à la possibilité de réviser le traité fondateur. La réforme du Mécanisme européen de stabilité a évidemment nécessité l’approbation des gouvernements ainsi que la ratification parlementaire de chaque État.

Les nouvelles conditions d’accès au fonds de sauvetage prévues par la réforme ont été immédiatement considérées comme sévères, à tel point que l’accès au programme d’aide a été rendu beaucoup plus difficile. Les conditions d’activation de la PCCL (Precautionary Conditioned Credit Line), un système d’aide financière en cas de turbulences sur le marché de la dette d’un pays de la zone euro, ont été mises sur la table des discussions.

Les conditions les plus caractéristiques de la proposition de réforme du MES étaient les suivantes :

  • ne pas faire l’objet d’une procédure d’infraction ;
  • avoir un ratio déficit/PIB inférieur à 3 % depuis au moins deux ans ;
  • avoir un ratio dette/PIB inférieur à 60 % (ou, au moins, avoir connu une réduction de ce dernier d’au moins 1/20 au cours des deux dernières années, ainsi qu’une autre série de critères difficiles à évaluer objectivement).

L’accord signé fin janvier 2021 a donc approuvé le cadre réformé du MES, qui comprend :

  • deux lignes de crédit, une ligne de précaution, avec les enjeux vus plus haut, et une ligne renforcée pour les pays qui ne remplissent pas les conditions.
  • une coopération accrue entre les institutions de l’UE et le MES ;
  • l’introduction de clauses d’action collective avec un vote unique des créanciers pour faciliter la restructuration de la dette.

En réponse à la crise de la pandémie de Covid, le MES a mis en place une ligne de crédit de 240 milliards d’euros pour aider les pays de la zone euro à faire face aux dépenses de santé d’urgence. Cependant, malgré la disponibilité de cette ligne de crédit, les États membres de l’UE n’ont pas encore utilisé ces fonds.

Le filet de sécurité bancaire

L’une des réformes les plus importantes décidées par l’Eurogroupe concerne le backstop pour le secteur bancaire. Il s’agit d’une garantie pour le fonds de résolution bancaire (SRB), fournie par le MES sous la forme d’une ligne de crédit, qui garantit un soutien aux banques au bord de la faillite en cas d’épuisement des ressources du fonds.

Dans le cadre de la réforme, la FEM doit servir de médiateur entre les États et les investisseurs privés dans la restructuration de la dette publique.

Suite à la décision de la Cour constitutionnelle allemande de rejeter le recours des sept eurodéputés libéraux, la réforme du Mécanisme européen de stabilité a reçu le feu vert. Cependant, il y a encore un pays, l’Italie, qui doit maintenant donner son accord pour le lancement final. Entre-temps, après l’entrée de la Croatie dans la zone euro au début de l’année, Zagreb a rejoint le MES et a approuvé le traité fondateur et le traité de réforme.

Critiques à l’encontre du MES

Pour mieux comprendre ce qu’est le MES et comment il fonctionne, on ne peut faire l’économie d’un examen des réserves exprimées à son égard. L’un des points les plus débattus a toujours été le pouvoir renouvelé de la Banque centrale européenne et, par conséquent, les limites imposées au secteur bancaire et aux gouvernements nationaux.

Les critiques de la Grèce n’ont pas manqué non plus : Varoufakis, l’ancien ministre grec des finances, a dénoncé les mécanismes du fonds dans son livre “The Global Minotaur“.

La somme de garantie fournie aux États en difficulté est divisée et constituée des participations de chaque membre qui n’est pas en difficulté. En résumé, une partie de l’argent accordé à la Grèce a été complétée par des capitaux apportés en partie par l’Allemagne, en partie par l’Italie, la France, etc. Mais comme chaque pays parvient à assurer sa propre solvabilité, la part payée par chacun est comptabilisée à un taux d’intérêt différent.

Et c’est là que réside le danger : si l’un des États les plus “fiables” se trouvait en difficulté et avait besoin du mécanisme, le montant des fonds qu’il ne peut plus garantir se répercuterait nécessairement sur les États plus petits.