En 2019, alors que les premiers objectifs de réduction des émissions pour l’industrie automobile étaient sur le point d’entrer en vigueur, Bruxelles a été inondée de prévisions sombres. Un rapport de Jato Dynamics prévoyait que les constructeurs automobiles de l’UE devraient payer 34 milliards de pénalités pour leur non-respect des limites d’émission. Un véritable désastre. En 2020, les ventes de véhicules électriques à batterie ont été multipliées par trois en un an. L’UE devance même la Chine en termes de volumes de ventes, tandis que les constructeurs automobiles réalisent des bénéfices records. La catastrophe s’est évanouie…

Analyse des ventes et objectifs pour 2025

Une histoire similaire se répète à l’approche de l’objectif modeste fixé pour 2025, qui exige des constructeurs automobiles qu’ils réduisent de 15 % supplémentaires les émissions de gaz à effet de serre produites par leurs immatriculations annuelles. Selon l’analyse de Transport & Environment, basée sur les chiffres de vente de 2023 disponibles à ce jour, Volvo a déjà atteint ses objectifs ; Renault est sur le point de les atteindre ; Mercedes est exactement deux fois plus loin et Volkswagen est encore plus loin.

La réaction actuelle des constructeurs automobiles n’est pas très différente de celle d’il y a quelques années. Selon eux, les consommateurs n’achètent pas les véhicules électriques assez rapidement et massivement pour leur permettre d’atteindre leurs objectifs de décarbonisation. Nous pensons que cette interprétation de la situation est erronée et que les demandes adressées à l’UE sont injustifiées.

Leçons du passé et perspectives d’avenir

La principale leçon tirée en 2020/21, avec le premier objectif de réduction des émissions, est que les prévisions basées sur les tendances actuelles du marché exposent facilement à de graves erreurs lorsqu’il s’agit d’estimer la capacité future à réduire les émissions. Les ventes de véhicules électriques dans l’UE-27 représentaient 1 % du marché en 2018. L’objectif 2020/21 était-il donc impossible à atteindre (comme le prétendaient déjà les constructeurs automobiles à l’époque) ? Non : elles ont atteint 5,4 % en 2020.

Pour atteindre le prochain objectif de réduction des émissions, T&E estime que les ventes de véhicules électriques devront atteindre en moyenne 20 % du marché en 2025, contre 15 % en 2023. Est-ce vraiment une mission impossible ? Les ventes de voitures électriques ont progressé plus lentement que prévu au cours de l’année écoulée en raison de l’absence d’une offre complète sur le marché de masse, à notre avis, plutôt qu’en raison d’un revirement soudain de la part des consommateurs. Ce n’est pas une coïncidence si de nombreuses petites voitures électriques devraient être lancées en 2025, y compris celles de Renault, Skoda et Citroën.

Stratégies de conformité

Dissipons également un mauvais mythe. Les règles de l’UE en matière de réduction des émissions des voitures ne constituent pas un « mandat de vente » pour les véhicules électriques. L’objectif de chaque constructeur automobile est conçu comme une valeur moyenne d’émission calibrée sur l’ensemble de ses immatriculations annuelles. Cela signifie qu’il existe de nombreuses options pour respecter la norme et atteindre les objectifs, y compris l’augmentation des ventes de véhicules hybrides ou la réduction de la taille des modèles les plus polluants.

Pour donner des exemples concrets, l’amélioration de l’efficacité des moteurs termiques conventionnels peut réduire de plus d’un quart, pour certains constructeurs automobiles, le nombre de véhicules électriques à vendre pour atteindre les objectifs de 2025. De même, les constructeurs peuvent regrouper leurs ventes pour respecter une valeur commune de CO2, comme l’ont fait Honda, Jlr et Tesla en 2022.

Volkswagen, dans le cadre d’une stratégie de décarbonisation purement électrique, devrait atteindre 24 % de ventes d’électriques en 2025. L’entreprise de Wolfsburg peut également améliorer l’efficacité de ses véhicules thermiques et hybrides et réaliser un pool avec Volvo Cars, abaissant ainsi le pourcentage des ventes de véhicules électriques à 19 %, ou ramener ce même pourcentage à 15 % dans le cadre d’un pool avec Tesla.

L’objectif de 2025 a jusqu’à présent été considéré comme le plus facile à atteindre. Le remettre en question, dans le contexte de la course mondiale à la suprématie sur le marché des véhicules électriques, est dangereux. Cela affaiblirait la seule politique qui pousse les constructeurs automobiles européens à investir dans l’électrification.