Le bail-in bancaire : définition
Qu’est-ce que le bail-in ? Le sens de cette législation est d’introduire des règles harmonisées pour les différents pays européens, en attribuant des pouvoirs spécifiques aux autorités de résolution chargées de gérer les crises bancaires au niveau de l’UE. Outre l’approbation des plans de redressement préparés par les banques, les autorités compétentes peuvent utiliser une large gamme d’outils, y compris la révocation du conseil d’administration dans des cas exceptionnels. Il leur appartient de définir la phase de résolution et la stratégie de recapitalisation de l’institution, selon une hiérarchie précise impliquant les actionnaires et les créanciers.
Le principe sous-jacent est d’utiliser le sauvetage interne (bail-in) comme alternative à la logique de bail-out (redressement externe avec intervention directe de l’Etat). Grâce aux innovations introduites par la directive, les investisseurs et les particuliers qui ont une relation directe avec la banque sont responsables des pertes, par le biais d’un prélèvement forcé sur les titres et les dépôts. Ce mécanisme respecte le principe du “no creditor worse off” : en tout état de cause, les pertes subies par les créanciers ne peuvent excéder celles qui seraient encourues en cas de liquidation judiciaire.
En France
L’entrée en vigueur du bail-in date du 1er janvier 2016. Ce système juridique transpose la directive européenne sur le redressement et la résolution des banques (BRRD), qui vise à prévenir les crises et à résoudre les défaillances financières des banques et des entreprises d’investissement. La législation sur le bail-in prévoit l’introduction d’un mécanisme de résolution unique pour la gestion centralisée des crises, ainsi que la création d’un Fonds de résolution unique pour faciliter la couverture des pertes subies par les institutions.
La gestion du mécanisme de résolution incombe au Conseil de résolution unique européen et, au niveau de chaque pays, aux autorités compétentes. En France, l’autorité désignée est la Banque de France.
Comment fonctionne le bail-in ?
Le règlement sur le bail-in a été créé dans le but de surmonter le principe du financement public non remboursable pour régler les dettes des banques et, plus généralement, le sauvetage d’institutions par des tiers. Désormais, l’absorption des pertes incombe directement aux actionnaires, aux détenteurs de dettes, aux créanciers non garantis et aux titulaires de comptes courants de l’établissement. L’objectif est d’éviter la faillite des grandes banques et de permettre aux établissements de ne pas interrompre les services essentiels.
En cas de restructuration de la dette bancaire, le bail-in prévoit des protections spécifiques. Les dépôts garantis par le Fonds de protection des dépôts interbancaires, ainsi que les dettes garanties et les actifs détenus en fiducie auprès de la banque, tels que le contenu des coffres-forts, sont exclus du prélèvement. Les instruments financiers émis par d’autres entités gérées par la banque ne sont pas non plus concernés.
En revanche, les détenteurs d’instruments émis et achetés avant l’entrée en vigueur du règlement peuvent être responsables. En conséquence du bail-in, les titres peuvent être dépréciés, convertis en actions, l’échéance et le montant des intérêts peuvent être modifiés ou les intérêts peuvent être gelés, à l’exclusion de certaines catégories d’investissements.
La hierarchie
Comment fonctionne le bail-in pour les différentes catégories de créanciers ? Selon la hiérarchie prévue par la directive européenne, les détenteurs des instruments les plus risqués, c’est-à-dire les actionnaires, les détenteurs d’obligations convertibles en actions et d’instruments similaires, sont les premiers à réagir. Viennent ensuite les détenteurs d’obligations subordonnées et d’obligations senior. En cas de risque de défaillance, les autorités peuvent annuler ou réduire la valeur des titres ou ordonner la conversion des obligations (y compris les obligations ordinaires) en actions, ainsi que suspendre le paiement des intérêts.
Les créanciers chirographaires qui ne disposent pas d’un droit de préemption sont également exposés aux effets du renflouement : les salariés et les créanciers préférentiels sont exclus. En dernier recours, les titulaires de comptes courants et les dépôts (attribuables à des personnes physiques ou à des sociétés) dont le montant est supérieur à 100 000 euros sont concernés. En revanche, les comptes courants, les comptes d’épargne et les dépôts dont les montants sont inférieurs à ce seuil sont protégés du bail-in.
Directive européenne sur le bail-in
L’entrée en vigueur du bail in s’inscrit dans une stratégie plus large visant à améliorer la stabilité du système financier européen. Elle a débuté en 2014, avec l’introduction du mécanisme de surveillance unique impliquant les plus grandes institutions bancaires. En complément de cet instrument, le mécanisme de résolution unique est mis en place en 2016 et la directive relative au sauvetage des établissements de crédit en crise (directive 2014/59/UE) devient opérationnelle.
Le premier établissement de crédit touché par le bail-in, au niveau européen, a été la société autrichienne HETA ASSET RESOLUTION AG, une structure de défaisance créée pour gérer les prêts douteux de Hypo Alpe Adria. Le plan de redressement publié par le Finanzmarktaufsicht – l’autorité autrichienne de surveillance des marchés financiers – prévoyait l’abandon des obligations subordonnées, une réduction de plus de 53 % des obligations de premier rang et l’annulation des paiements d’intérêts.
Pour résumé
Comment se protéger du bail-in ? Comme nous l’avons vu, pour les titulaires de comptes à vue, le bail-in interne ne s’applique pas aux sommes supérieures à 100 000 euros. Ce seuil s’applique également aux comptes joints et s’entend par titulaire de compte individuel : si le compte est au nom de deux personnes, le Fonds de garantie des dépôts couvrira un montant maximum de 200.000 euros.
En revanche, si une même personne possède plusieurs comptes dans la même banque, le seuil de capital garanti restera inchangé. Cela dit, il n’existe pas de stratégie unique pour se défendre contre le bail-in (en gardant toujours à l’esprit que le Fonds interbancaire de protection des dépôts ne dispose pas d’une disponibilité illimitée). Outre la surveillance de la notation des banques, la solution consiste à diversifier au maximum les investissements, en se tournant éventuellement vers des instruments sécurisés tels que les obligations sécurisées et autres titres de créance à l’abri du bail-in.